La France et le Maroc: quinze ans de règne et cent ans d’amitié

Le 23 juillet 2014 seront fêtées les quinze années de règne de sa Majesté Mohamed VI, Roi du Maroc, qui accéda au trône à la mort de son père Hassan II.

On lui doit d’incontestables évolutions positives en matière de démocratie et de droits de la personne humaine. La modification de la Constitution approuvée le 1er juillet 2011 par référendum, celle du code de la famille de 2004 marquant un progrès indiscutable dans la marche vers l’égalité homme-femme et les innovations favorisant la reconnaissance mutuelle des divers groupes ethniques ou confessionnels qui composent le Maroc méritent la plus grande considération et le plus grand respect.

Aucun pays, la France en tête, ne peut se poser en donneur de leçons puisqu’aucun pays ne saurait se targuer d’être un serviteur sans faiblesse des droits de la personne humaine.

Plutôt que de déplorer ce qui n’est pas encore advenu, il faut saluer cette évolution prometteuse qui conduira sans doute demain le Maroc à abolir la peine de mort et à consentir aux femmes les mêmes droits qu’aux hommes dans la succession de leurs parents, pour ne citer que ces deux exemples.

Ceux qui ont connu le Maroc des années 70 comme coopérants civils (j’en étais) eurent l’occasion de découvrir non seulement un pays splendide, mais un peuple profondément attachant par la qualité de ses traditions, son hospitalité, sa tolérance, sa modération et le respect de valeurs parfois oubliées chez nous : le respect de la jeune fille, l’accueil réservé à l’hôte de passage appelé l’invité de Dieu, la considération pour les vieillards et l’extraordinaire humilité qui conduit à se soumettre au temps et à la terre à la manière de Francis Bacon disant : « On ne commande à la nature qu’en lui obéissant ».

Les refroidissements diplomatiques ne dureront pas.

D’ailleurs, ils ne sont chargés d’aucune espérance ni d’aucun progrès, tandis que la France peut se réjouir d’avoir parmi ses concitoyens nombre d’hommes et de femmes nés français en France de parents marocains. Juifs, chrétiens, musulmans, ils se défient des tentations de guerre civile et se manifestent infiniment moins d’hostilité qu’il y a trois cents ans en Europe ou aujourd’hui au Proche-Orient ne s’en témoignent les prétendus disciples du même Dieu.

Bref, ces compatriotes méditerranéens méritent notre considération, notre affection et notre aide, comme nous avons besoin de leurs leçons d’humanité.

Un petit groupe est en train de fonder la « Fédération internationale d’initiative franco-marocaine pour les droits humains et le développement économique et culturel ». Son siège social sera fixé provisoirement 41 avenue Foch – 75116 Paris. Son objectif sera de renforcer la lutte contre toute forme de discrimination, le progrès des droits humains, le développement économique et culturel déjà amorcé en de nombreux domaines.

J’avais eu l’honneur de préparer avec mes homologues marocains une convention de réciprocité entre le barreau du Maroc et les avocats de France pour favoriser l’installation des avocats dans le pays des autres.

Le grand rêve serait d’obtenir un jour que le Maroc ne soit pas simplement une nation associée du Conseil de l’Europe mais qu’après modification du statut du Conseil de l’Europe lui-même, il puisse en devenir membre à part entière comme l’est aujourd’hui la Turquie dont une toute petite partie seulement se trouve située en Europe et l’essentiel dans le continent asiatique.

Le détroit de Gibraltar entre l’Europe et le Maroc est tout à fait comparable au Bosphore et ce serait un indéniable progrès que cette ouverture. Elle suppose que l’on cesse de considérer que les bras de mer nous séparent alors qu’ils nous relient.

N’oublions jamais les mots du premier président du gouvernement provisoire de la République française, Alphonse de Lamartine : « Je suis concitoyen de tout homme qui pense : la liberté c’est mon pays !». Telle est, et telle sera toujours davantage, notre culture commune.

 

                                               Christian Charrière-Bournazel

Ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats de Paris

Ancien président du Conseil National des Barreaux