Rejet du recours des avocats contre les taxes 35 et 150 €

Rejet du recours des avocats contre les taxes 35 et 150 €

Le Conseil national des barreaux avait contesté devant le Conseil d’État la légalité des dispositions du décret n°2011-1202 du 28 septembre 2011 relatif à la contribution pour l’aide juridique et au droit affecté au fonds d’indemnisation de la profession d’avoués près les cours d’appel.

Nous avions notamment invoqué des moyens relatifs à la légalité externe du décret attaqué, ainsi que des moyens de légalité interne tirés de la violation du droit au recours, du principe du contradictoire et du principe d’égalité devant la justice fondés à la fois sur le bloc de constitutionnalité et sur la Convention européenne des droits de l’homme.

Malheureusement, le Conseil d’Etat par un arrêt du 28 décembre dernier, a rejeté les différentes requêtes formées à l’encontre du décret du 28 septembre 2011 instituant les taxes de 35 € pour l’aide juridique et de 150 € pour l’indemnisation des avoués.

Le Conseil d’État a tout d’abord estimé, relativement à la violation des articles 6 et 13 de la CEDH, que les buts poursuivis par les pouvoirs publics en publiant le décret attaqué étaient légitimes, dès lors au moins que les sommes ainsi réclamées aux justiciables ne constituent pas une charge excessive et qu’il a été tenu compte des facultés contributives des justiciables, notamment ceux bénéficiaires de l’aide juridictionnelle.

Le Conseil d’Etat a également rejeté le moyen reprochant au décret attaqué de méconnaître le principe du contradictoire en permettant au juge de relever d’office l’irrecevabilité résultant du non acquittement de la contribution sans inviter les parties à régulariser. Il a ainsi estimé qu’il n’était pas indispensable que le requérant soit préalablement mis en mesure, soit de manière directe soit par l’intermédiaire de son avocat, qui est un professionnel averti, de respecter la formalité introduite par le décret.

Le Conseil d’État a ensuite écarté, en se fondant sur les dispositions législatives dont le décret attaqué fait application, le moyen tiré d’une violation de l’égalité devant la justice au motif que le ministère public est dispensé du paiement de la contribution. Le seul fait que le décret n’interdise pas aux juridictions d’adresser aux justiciables une demande de régularisation relative à l’acquittement de la contribution n’est pas non plus jugé contraire au principe d’égalité.

Enfin, le Conseil d’État n’a vu aucun problème dans le fait que le décret attaqué prévoit la possibilité d’acquitter la contribution par voie de timbre mobile alors que le texte législatif (art. 1635 bis Q du CGI) prévoit un acquittement par voie de timbre électronique, car cette possibilité offerte par le décret permet de pallier à un dysfonctionnement du système électronique.

Cette décision est décevante.

Elle ne doit cependant pas nous arrêter dans le combat que la profession mène depuis plusieurs années pour une réforme globale du système de l’aide juridique et de son financement.

Sur la base des propositions formulées par la Commission Accès au droit, sous la présidence du Bâtonnier Myriam Picot, présentées lors des premiers Etats généraux organisés par le Conseil national des barreaux le 14 décembre dernier, et dont les actes seront prochainement publiés, il nous appartient d’exposer et de soutenir auprès des pouvoirs publics les réformes attendues par la profession en ce domaine. Il s’agit de permettre à tous, et notamment aux plus démunis, l’accès à un conseil et une défense de qualité.

Il faut maintenant que cette réforme passe dans les textes.

Nous devons par conséquent aller à la Chancellerie, au ministère des Finances, toujours réticent même quand on ne lui demande pas d’argent, et devant les parlementaires, pour transmettre à ceux qui ont le pouvoir de décider les propositions que le CNB a faites et débattues en assemblée générale. Il s’agit de trouver les moyens de faire en sorte que soient rémunérés convenablement, sans peser sur le budget de l’État, les avocats qui s’investissent dans l’aide juridictionnelle et qui ne demandent rien d’autre que de pouvoir assurer leurs fonctions dans le respect de leur serment .

Bâtonnier Christian Charrière-Bournazel
Président du Conseil national des barreaux